Petite présentation de l'auteur : Joël Jouanneau, auteur et metteur en scène, ne vient qu’en 1988 à l’écriture et à la mise en scène de pièces adressées aux enfants dont il précise qu’ils peuvent être « petits et grands ». Après Mamie Ouate en Papoâsie, (Actes Sud-Papiers/Heyoka Jeunesse, 1999), Le Dernier Rayon (Ecole des Loisirs, théâtre), l'Ebloui (Heyoka Jeunesse) et L’Adoptée (Actes Sud-Papiers/Heyoka Jeunesse 2004), il revient avec sa nouvelle pièce "Le marin d’eau douce" qui sera présentée en mai 2007 à Très Tôt Théâtre.

Joël Jouanneau et l’enfance

« Ãƒâ€°videmment je n’écris pas « pour enfants », évidemment non, ou alors, le disant, je me mentirais ou alors, et ce serait plus grave encore, je leur mentirais ; ça n’existe pas, pour moi, « les enfants », c’est même peut-être contre ça, en partie je veux dire, que j’écris, contre ce pluriel là ; oui, je me plais au contraire à les imaginer isolés dans les théâtres, regardant la scène, et personne à droite ou à gauche, pas d’appui. Un fauteuil sur deux, un rang sur deux, seuls face à la scène, c’est ainsi que j’aimerais qu’ils soient, toujours, dans les boîtes noires. »

« Ecrire c'est noircir une page blanche, mettre en scène, c'est éclairer une boîte noire ».

__ Différentes étapes :__

1. L e choix des textes : cette étape est primordiale, le mieux est de faire en amont l'expérience de la lecture à haute voix, entre adultes, afin de choisir au mieux les textes pour les enfants.

2. La lecture à voix haute, en classe, quelques pistes : Pour Joël Jouanneau, il est important d'insister sur la lecture à voix haute avant de passer à l'interprétation, il préconise donc de commencer par une lecture basée sur la musicalité du texte plutôt que sur son sens.

• Première lecture :

Commencer par travailler tout d'abord la musicalité du texte, en faisant abstraction de son sens. Même si cela est difficile et va à l'encontre de ce qu'on demande habituellement aux enfants, essayer de « lire sans penser », froidement, sans interprétation psychologique, historique... du personnage pour commencer par découvrir la matérialité, la musicalité du texte.

« Faire confiance à la musique d'une langue » : le souffle, la ponctuation, la matérialité du texte... produisent du sens. Il est important que l'enseignant participe à la lecture à voix haute, et plus particulièrement encore à la première lecture.

Ne surtout pas demander à un élève de lire seul un texte chez lui : le théâtre est fait pour être prononcé, et doit donc être découvert, à voix haute.

Apprendre aux enfants à respecter chaque mot, à respecter la ponctuation, faire dire le « e » féminin.

Apprendre à faire « marcher » un texte (Nietzsche disait: « avoir du génie dans les pieds ») : est important pour le souffle.

Il est important de ne pas enfermer les enfants dans le sens de l'auteur mais les laisser se construire leur propre sens, les laisser ouvrir leur imaginaire. Produire du sens et non un sens (ce qui se produira nécessairement si on ne fait pas cette "immatérialité" de la lecture !).

• « Bouleverser la salle de classe » :

Présenter la lecture à voix haute comme une activité ludique, qui peut passer par un réaménagement de la salle. Délimiter (matériellement)l'espace de la scène et du public. A qui on s'adresse ? De quelle manière ? La disposition de la salle est importante pour ouvrir l'imaginaire des enfants.

Il y a beaucoup de possibilités dans les modalités de la lecture à voix haute, qui peuvent produire du sens différemment :
- disposition de la salle en lien avec la répartition du texte (jouer par exemple les rapports de confrontation entre les personnages)

- répartition des rôles ( les paroles peuvent par exemple se partager : paroles chorales)...

Ne pas laisser d'enfants de côté : cet exercice permet parfois aux enfants « en difficultés » de s'ouvrir. Donner aux enfants le plaisir du jeu

3. Exercices :

• La première fois : faire lire le texte sans donner d'interprétation en respectant simplement les voyelles, la ponctuation...

• Faire dire à l'enfant le texte à 1 mètre, à 3 mètres, à 6 mètres... Pour travailler la puissance, l'énergie de la voix : passer du silence au cri. Apprendre à l'enfant à gérer son « niveau sonore ».

NB : la lecture à voix haute demande de l'énergie, il est important d'adapter la longueur du passage lu à haute voix à l'âge des enfants. Il est donc préférable de décortiquer et jouer une seule scène plutôt que la pièce entière.

• Faire dire le texte avec, par exemple, un bras caché derrière le dos : cela permet une meilleure prise de conscience de la parole et du geste.

• Travailler sur l'imaginaire des mots, sur comment un mot produit de l'imaginaire. (exemple : le mot « ÃƒÂ©criture » contient le mot « cri », « apprendre » contient « prendre »...)

• Travailler sur la ponctuation :

- Apprendre à l'enfant ce qu'est une mémoire visuelle : lui faire écrire le texte tel qu'il est écrit dans le livre, en respectant la ponctuation.

- « Visualiser le texte par des gestes » : mémoriser la ponctuation et la matérialiser par un geste (exemple à chaque point, l'enfant fait un saut, à chaque virgule il tourne à droite...)